La dissolution d’une société pour mésentente entre associés ne peut être prononcée par le juge sur la demande d’un seul associé que si ce dernier n’est pas le seul responsable de cette mésentente.
C’est ce que vient de juger la Cour d’Appel de Bordeaux dans son arrêt du 10-1-2023 n°22/01177.
QUEL EST LE RÉGIME DE LA DISSOLUTION D’UNE SOCIÉTÉ POUR MÉSENTENTE ENTRE ASSOCIES ?
L’article 1844-7, 5° du Code civil dispose que :
» La société prend fin : (…)
5° Par la dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d’un associé pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé, ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société ; (…) »
La dissolution de la société ne peut donc être prononcée par le juge que s’il constate une paralysie du fonctionnement de celle-ci.
La Cour de Cassation laisse aux juges du fonds (de première instance et d’appel) le soin d’apprécier si le motif invoqué présente un caractère de gravité suffisant pour justifier qu’il soit mis fin à la société.
Au cas particulier, des divergences sont apparues entre deux associés d’une société par actions simplifiée (SAS).
Le premier détenait 51 % du capital et le second 49 %.
L’associé minoritaire a demandé la dissolution de la société pour mésentente ayant paralysé le fonctionnement de la SAS considérant que l’associé majoritaire :
- avait sollicité la résiliation judiciaire d’un contrat conclu entre la SAS et une autre société contrôlée par l’associé minoritaire ;
- avait décidé, lors d’une assemblée générale tenue en l’absence de l’associé minoritaire, de modifier les règles statutaires de majorité pour autoriser la demande de résiliation ;
L’associé majoritaire s’est opposé à la demande de dissolution arguant que c’était en réalité l’associé minoritaire qui était à l’origine de la mésentente.
La cour d’appel de Bordeaux rejette cet argument et accepte la demande de dissolution considérant que le juge ne peut exclure le juste motif que si le demandeur est seul responsable de la mésentente.
Autrement dit, il est nécessaire pour le demandeur de rapporter la preuve objective que la mésentente est également causée par le comportement du ou des autres associés et pas seulement à son seul comportement.
En l’espèce, le comportement de l’associé majoritaire (s’opposant à la demande de dissolution judiciaire) avait participé pour une part non négligeable à la mésentente.
La demande de dissolution de la société a donc été acceptée dès lors que la paralysie du fonctionnement de la SAS était caractérisée au regard des éléments suivants :
- les associés avaient multiplié les contentieux ;
- les assemblées générales avaient continué d’être tenues en l’absence systématique de l’associé minoritaire, qui en contestait la régularité ;
- la société n’avait plus déposé ses comptes sociaux depuis plusieurs années.
Pour éviter ces situations de blocage, il est nécessaire de prévoir au moment de la création de la société des mécanismes juridiques permettant d’éviter ces situations de blocage (Clause d’Exclusion, Clause de Rachat Forcé,…).
Le cabinet DI ROCCO AVOCAT accompagne quotidiennement les entrepreneurs dans le cadre de la création de leur société et la rédaction adéquate des statuts régissant les relations entre associés en vue d’éviter dans la mesure du possible ces situations de blocage.